L’histoire de la culture ne peut faire l’économie de l’histoire des conditions intellectuelles et matérielles de l’accès aux textes, c’est-à-dire de l’histoire des bibliothèques. Comment cet accès a-t-il été possible au long du Moyen Âge occidental, quelles constantes et quelles évolutions dégager de la documentation dont nous disposons ? Celle-ci est certainement très maigre par rapport à ce qui a pu exister, mais nous ignorons l’ampleur de ses lacunes. Pour la France, nous avons identifié environ mille inventaires médiévaux (Annie GENEVOIS, Jean-François GENEST et Anne CHALANDON, 1987 ; André VERNET, Paris, 1989), et pour toute l’Europe, environ cinq-cents inventaires complets sont repérés jusqu’à la fin du XIIe siècle (Gustav BECKER, 1885 ;Theodor GOTTLIEB, 1890). Liste de biens à remettre à jour souvent, par exemple chaque fois que l’on veut faire le point sur les possessions mobilières d’un établissement religieux, la liste de livres médiévale est par nature éphémère, périssable, marginale, parfois incluse dans un autre document administratif : cela explique que tous les documents n’aient pas été repérés et qu’un nombre probablement très élevé d’entre eux ait disparu. La reconstruction historique est donc nécessairement grossière, surtout en quelques pages, et la linéarité de l’exposé ne doit pas faire croire à la linéarité des faits.
De la bibliothèque antique au modèle cassiodorien
A partir du IIIe siècle avant J.C., l’Antiquité avait connu des bibliothèques très riches – les plus célèbres sont celles d’Alexandrie (le Musée et le Serapeion, vers 300 avant J.C.) et de Pergame (première moitié du IIe s. avant J.C., sous Eumène II), ou encore le Ptolemaion de Ptolémée Evergète à Athènes –, et dont les catalogues pouvaient être extrêmement précis (Rosa OTRANTO, 2000). Mais la mise au point de catalogues sophistiqués est en fait bien antérieure à la bibliothèque grecque puis romaine. Les catalogues de la bibliothèque d’Asssurbanipal (Assyro-Babylonie, Ninive, VIIe s. avant J.C.), bibliothèque de conservation au caractère archivistique accusé (voir le n° 1 de l’exposition), mentionnaient l’incipit des textes et le nombre de lignes des volumes ; le catalogue de bibliothèque de l’état hittite, au XIIIe s. avant J.C., comprenait une liste alphabétique des auteurs et des œuvres, un raffinement que l’Occident latin ne redécouvrira qu’au XIe s. de notre ère. Entre les bibliothèques de l’Orient ancien et l’époque ptolémaïque, nous n’avons pas de traces de bibliothèques à proprement parler, mais de collections privées de faible importance : la civilisation de la cité grecque classique, contrairement à celle de la cité hellénistique, ne s’accommode pas d’un lieu fermé ni dédié à la lecture, surtout solitaire. En revanche, pour les lecteurs de l’époque hellénistique, un seul mot, πίναξ, désigne la planche, le panneau d’affichage, et le catalogue ou liste bibliographique (on connaît les Pinakes composés par Callimaque [310/305–240 avant J.C.] sur la base des collections de la bibliothèque d’Alexandrie) : une acception qui n’a de sens que parce que la bibliothèque est alors publique, avec un catalogue accessible à tous.
A Rome, la fondation de la première bibliothèque publique était projetée par César mais fut réalisée, d’après Pline (Hist. nat., VII, 115et XXXV, 10), par son ami Asinius Pollion, historien, orateur et poète. La bibliothèque institutionnelle romaine, développée par les empereurs, est elle aussi un lieu monumental, dont le nymphée de Nîmes (quelle qu’ait été sa destination véritable) peut donner une idée(Wolfram HOEPFNER, 2002 ; W. P. CAMPBELL, 2013). Lieu de conservation doté de magasiniers et bibliothécaires (souvent des esclaves ou des affranchis hellénophones), lieude lecture dans lequel on déroule et ré-enroule des rouleaux de papyrus mesurant entre trois et douze mètres de long, elle est un lieu de sociabilité, de conversation, où se développe l’amicitia des hommes de culture. C’est l’un des lieux-clés de la civilisation antique, à tel point qu’à Rome, encore sous Constantin (début IVe s.), on comptait, dit-on, vingt-huit bibliothèques publiques. Les sources littéraires et juridiques (Maddalena SPALLONE, 2008 ; Emmanuelle VALETTE-CAGNAC, 1997) témoignent aussi de l’importance des collections privées, que rendaient possiblesnon seulement les circuits amicaux de circulation des textes, mais aussi l’existence d’ « éditeurs », comme l’ami de Cicéron Atticus, et de libraires professionnels, attestée non seulement à Rome (par exemple Martial, Epigr. I,2 et I,117), mais aussi dans d’autres régions de l’Empire, comme à Lyon.
Mésopotamienne, grecque ou romaine, la bibliothèque antique était liée étroitement à une figure de fondateur, qui à travers elle jouait un rôle politique et social, et à un lieu dans lequel s’épanouissait une société dont le degré d’alphabétisation était assez élevé. Mais dans la seconde moitié du IVe siècle, l’historien païen Ammien Marcellin constate déjà le naufrage de ce modèle antique : « les bibliothèques ayant été fermées pour toujours, comme des sépulcres, on fabrique des orgues hydrauliques » (Historiae, XIV, VI, 18). Les bibliothèques qui ferment sont le signe d’une société malade qui ne se soucie plus que de plaisirs d’analphabètes. De fait, la société, même si elle conserve un certain degré d’alphabétisation, a profondément changé à l’époque d’Ammien.
Les changements politiques font vaciller le lien entre le fondateur, comme Trajan ou Hadrien, et une institution culturelle liée à un tissu social qui se défait, en particulier au niveau de l’aristocratie païenne cultivée. Les changements religieux, indissociables des premiers, font évoluer les structures du pouvoir et de l’administration, qui se concentrent autour des évêques ou de personnalités charismatiques qui possèdent des livres, les prêtent, les échangent, en organisent la circulation dans des réseaux restreints (Harry Y. GAMBLE, 1995, p. 174-176 et p. 196 de la trad. ital., 2006). Sidoine Apollinaire, dans la seconde moitié du Ve s., décrit ainsi, dans un texte célèbre, les livres de l’ancien préfet du prétoire des GaulesTonantius Ferreolus en son domaine de Prusianum (Epist. II, IX, 4-5). Ce mouvement de repli fait de certaines bibliothèques capitulaires les plus anciennes de notre Moyen Âge occidental : comme celles de Lyon et Vérone, qui sont encore, en grande partie, conservées sur place. Cette évolution s’accompagne d’un changement décisif, celui de la forme du livre. Le livre « à la grecque » adopté par l’aristocratie romaine, le rouleau, disparaît au profit d’une forme utilisée de tout temps par les Romains pour leurs archives, leurs notes, leurs brouillons, un livre de catégorie inférieure en quelque sorte : le codex. Ce livre – notre livre – que l’on peut transporter facilement, lire sans l’aide d’autrui, qui peut contenir plus de textes qu’un rouleau parce qu’il est écrit au recto et au verso, et que l’on peut ouvrir où l’on veut, comme on veut, quand on veut, favorise une lecture sporadique, répétitive, et privée. Cette forme de repli est ainsi, pour les textes, un gage de lecture plus commode, et donc de diffusion, mais dans un cadre désormais restreint.
Ce type de collection privée, dont l’usage est éventuellement étendu à une petite communauté chrétienne, donne naissance, vers 540, en Calabre à Squillace, dans la communauté religieuse et intellectuelle de Vivarium fondée par Cassiodore (vers 485 – vers 580), à une forme nouvelle de bibliothèque. Dans les Institutiones (Roger A. B. MYNORS, 1937), Cassiodore expose une conception du savoir divisé entre lettres divines et lettres profanes. Les lettres divines sont organisées selon une progression spirituelle menant à la contemplation de Dieu, les lettres profanes donnent sous une forme abrégée les outils pour y parvenir. La bibliothèque devient alors le lieu de conservation et de production de ces outils et des textes à lire pour accomplir le cheminement spirituel. Pour la première fois est pensée l’alliance en un même lieu et pour un même but de la conservation d’un patrimoine écrit, de la production d’instruments de travail, en particulier de corpus thématiques rendus possibles par la nouvelle forme du livre, de l’atelier de copie des livres dédié à la transmission des textes, et de la méditation des textes par la lecture individuelle, en vue d’un progrès spirituel non seulement de l’individu, mais de toute sa communauté. Contrairement à ce qu’avait connu l’Antiquité et à ce que nous connaissons, il n’y a pas de séparation des tâches ni d’enjeu commercial : les mêmes hommes font tout au même endroit. Avec les Institutiones, cette collection de livres a un véritable coutumier de type monastique, qui comble le vide laissé en ce domaine par la Règle bénédictine, à peu près contemporaine. Semi-privée, semi-publique, avec sa double fonction de conservation et de transmission, avec l’alliance du scriptorium et de l’armarium, Vivarium offre le paradigme de la bibliothèque médiévale (Guglielmo CAVALLO, 1987, P. 331-442).
Mais peut-on parler vraiment de bibliothèque ? Il n’y a pas de lieu unique pour le rangement des livres et il y a relativement peu de volumes, qui sont accessibles aux membres d’une même famille spirituelle mais pas au public. Ce que montre l’étude des sources conservées, manuscrits et inventaires anciens quand nous en avons, c’est une évolution à la fois diachronique et qualitative qui mène, au cours du Moyen Âge, de la collection cassiodorienne à un nouveau type de bibliothèque publique : c’est en somme l’histoire des retrouvailles de l’Occident latin avec la bibliothèque, son catalogue et son bibliothécaire.
De la dispersion à la bibliothèque
La bibliotheca a été connue pendant tout le Moyen Âge par les sources littéraires et encyclopédiques, dont la plus importante et la plus répandue, les Etymologies d’Isidore de Séville (César CHAPARRO GOMEZ, 2012). Cette tradition qui permet de savoir que la bibliotheca est un lieu de rangement et de consultation des livres lié à une figure de fondateur confère une certaine ambiguïté à des sources dans lesquelles bibliotheca ne désigne peut-être qu’une série de livres ; on peut penser à la bibliotheca mentionnée par le testament de Charlemagne dont Eginhard donne la teneur(Eginhard, 2014, p. 82-83 ; de Bernhard BISCHOFF , 1965), ou à l’abbé Olbert de Gembloux (XIe siècle) qui a pu être comparé à Ptolémée Philadelphe pour avoir rassemblé une centaine de livres sur les Ecritures et cinquante sur la littérature profane (G. H. PERTZ, 1848, p. 540)— des nombres qui semblent eux-mêmes topiques, et qui, même ainsi, sont très inférieurs à ce que représentait une bibliothèque antique. C’est que la réalité était bien différente, au point que le terme de bibliotheca, dans les sources issues de la plume des responsables de collections de livres, ne désigne quasiment jamais une bibliothèque avant la fin du XIe siècle et rarement avant le XIIIe, mais un corpus de textes, le plus souvent la Bible.
Et de fait, les livres ne se trouvent pas dans une « bibliothèque » à cette époque, mais là où ils servent : en attestent certains inventaires permettant de voir le responsable des livres en train d’effectuer un récolement de dépôt en dépôt, comme à Lincoln en 1150 (James F. DIMOCK, 1877, App. C, p. 165-171), à Rochester en 1202 (British Library, Royal 5 B XII f. 2-3, éd. CBMLC 4, p. 497-526)– les livres de l’église, ceux du réfectoire, de l’infirmerie, ceux qu’utilise le chantre, ceux qui sont consacrés à l’enseignement etc. –, le nombre élevé de listes partielles ne décrivant que l’une de ces petites collections, et les lieux de rangement conservés. Il n’est pas rare, dans les abbayes des XIIe-XIIIe s., de repérer de petites niches portant encore la trace des rainures destinées à des rayonnages, capables de contenir quelques dizaines de manuscrits tout au plus, dans l’église, dans le cloître, à l’entrée du réfectoire… Les sources écrites et archéologiques, les enluminures permettent de savoir qu’outre ces niches aux rayonnages de bois ou de pierre étaient utilisés des coffres (arca), des coffrets (capsa, scrinium), des armoires (armarium, librarium – qui peut désigner aussi un ensemble de livres –, libraria) : en France, la plus ancienne armoire en bois destinée à des livres (XIIe s.) est visible dans l’église de l’abbaye cistercienne d’Obazine (Corrèze). Plusieurs auteurs se sont appuyés sur le célèbre plan de l’abbaye de Saint-Gall pour dater du début du IXe siècle l’apparition d’une pièce réservée à la bibliothèque(Anne PRACHE, 1987, p. 350-363) Ainsi peut-on lire sous la plume d’André Masson (cité comme une autorité dans toutes les publications sur ce sujet) : « Cîteaux offre le seul exemple encore conservé d’une disposition qu’elle partageait jadis avec Clairvaux et qui remonte à la plus sûre tradition carolingienne : la superposition de la bibliothèque et de la salle des copistes. Sur le plan de Saint-Gall nous lisons, en effet, dans une salle située auchevet du choeur de l’église, infra sedes scribentium, supra bibliotheca » (André MASSON, 1972,p. 16). Mais le plan de Saint-Gall est une fiction (on sait que ce plan idéal a été adressé dans les années 820 à l’abbé Gozbert de Saint-Gall par Heito, abbé de la Reichenau jusqu’en 822), et les bibliothèques de Cîteaux et Clairvaux sont postérieures de près de sept siècles. La seule allusion concrète à un lieu de rangement spécial pour les livres figure, à ma connaissance, dans la chronique de Fontenelle (Saint-Wandrille), qui fait allusion à une tour indépendante, le pyrgiscos (Pascal PRADIE, Paris, 1999, p. 171), construite par Anségise (commanditaire probable des Gesta) à l’écart des bâtiments, certainement pour préserver mieux son contenu en cas d’incendie ; signifiant littéralement « petite tour », le terme peut désigner en grec une espèce de coffre-fort. C’est ce que l’abbé Hartmut fit à Saint-Gall pour mettre le trésor à l’abri (Ekkehard, 1980, p. 112)et c’est ce que fit Maieul à Cluny pour les archives en 981Hans Rudolf SENNHAUSER, 1995, p. 195-218). On peut penser que l’edecula que fit construire l’abbé Didier (1058-1086, pape sous le nom de Victor III de 1086 à 1087) au Mont-Cassin, destinée au seul rangement des livres, obéissait à la même logique (Hartmut HOFFMANN, 1980, p. 372).
La première description d’un lieu véritablement consacré au rangement des livres et où l’on peut se mouvoir apparaît dans le coutumier néo-clunisien de Guillaume de Hirsau, autour de 1080, qui emploie enfin le mot bibliotheca en expliquant qu’il désigne la même chose qu’armarium (Constitutiones de Guillaume d’Hirsau, 1880, chap. XXIII-XXIV) ; le grand catalogue de la bibliothèque de Cluny, certainement à peu près contemporain, utilise un terme ecclésial et royal, aula, pour désigner ce même espace où, d’après Guillaume, l’on n’a le droit ni de lire, ni d’écrire, ni de chanter, ni (si possible) de parler, et où seul le gardien des livres, sauf cas exceptionnel, peut entrer. Sans doute à la suite des clunisiens, les cisterciens (John W. CLARK, 1975, p. 74-82 ; Marcel AUBERT, 1943, p. 39-47 ; Anne BONDEELLE-SOUCHIER, 1991 ; Jean-Pierre ANIEL, 1983, P. 36-37) et les prémontrés(André MASSON, 1972, p. 10 ; Edgar LEHMANN, 1957, pl. IV, p. 13) construisent dès le XIIe siècle de petites pièces destinées aux livres, maisl’ambiguïté du mot armariumtraduit encore à cette époque la difficulté du passage de la niche à la pièce dédiée(Edgar LEHMANN, 1957, p. 19) : il faut apparemment attendre les XIVe-XVe siècles pour que le sens topographique d’armarium soit absolument clairJean-François GENEST, 1987, p. 141-149). Cette difficulté est bien illustrée par certaines pièces certes réservées aux livres, mais dans lesquelles, apparemment, seule une petite niche en contenait vraiment (par exemple à Arnsburg [Hesse], ou à San Galgano [Volterra]). A Clairvaux, quand Nicolas de Montiéramey parle, vers la fin des années 1140, de sa domuncula pleine de livres, parle-t-il de la bibliothèque de l’abbaye, ou seulement du petit local, son « petit scriptorium », dans lequel il exerce son métier de « chef de bureau », où l’on trouve un choix de livres analogue au contenu de certains coffres de lettrés décrits par quelques inventaires conservés (Adson de Montier-en-Der en 992, maître Haimon à Rochester en 1202) ?
De la liste au catalogue
Cette dispersion des livres est gérable parce qu’elle répond aux besoins concrets d’un établissement religieux, parce que les livres sont au total peu nombreux (souvent moins de quinze, plusieurs centaines exceptionnellement), et les lecteurs aussi. Le custos librorum (« gardien des livres »), l’armarius (il n’est que tardivement appelé bibliothecarius, André VERNET, « Du “chartophylax” au “librarian” »,dans Vocabulaire du livre et de l’écriture…,p. 155-167)un terme qui désigne souvent plutôt l’archiviste) exerce les fonctions de chantre, écolâtre, prieur, chancelier… : il connaît le contenu de tous les livres, qu’il prépare pour les lectures communautaires, et il peut sans difficulté majeure répondre aux besoins des lecteurs. Cette adéquation à des besoins de gestion explique que, jusqu’à la fin du XIIe siècle, la plupart des inventaires de livres soient désignés par leurs rédacteurs à l’aide de termes employés aussi pour les actes privés (breve, brevis, breviarium, notitia, commemoratio, annotatio…) (Anne-Marie TURCAN-VERKERK, 2012, p. 134-142), et que, même très détaillés, ils ne soient jamais destinés à trouver les livres. Ce sont des listes de biens précieux dressées à l’occasion d’un récolementlié à la prise de fonction d’un abbé, d’un évêque, d’un chancelier comme à Lincoln (etc.), du prêt de certains livres (Marie-Henriette JULLIEN de POMMEROL, 1998 (Bibliologia, 18), p. 339-374), d’un nouveau rangement, d’un déplacement (c’est peut-être le cas du n° 2 de l’exposition), d’un legs, d’un inventaire après décès, d’un échange, utilisées pour la rédaction de chroniques etc. Quand ce ne sont pas de simples listes de textes, dont il n’est même pas toujours sûr qu’ils correspondent au contenu d’une seule collection : on peut dresser une liste de titres que l’on cherche, ou de textes à dépouiller pour un florilège… que le chercheur d’aujourd’hui peut confondre parfois avec des inventaires de livres ; l’un des plus beaux exemples est le prétendu « catalogue de la bibliothèque de Charlemagne » (BMMF, n° 480. Claudia VILLA, 1996, p. 299-322). Bien souvent, les documents de gestion ne mentionnent que le premier texte d’un volume parce que c’est celui qui permet d’identifier le livre ou qui lui donne son nom d’usage ; pour la même raison, certains donnent des détails sur l’état physique du volume (délabré, mutilé, neuf : c’est le cas à Gorze(Dans Reims BM 427 f. 12-14 (BMMF n° 643), éd. Germain MORIN, dans RB, 22, 1905, p. 1-11, et Anne WAGNER, 1996, chap. III p. 101-190, éd., et p. 137-180, reprod. du f. 13v. p. 113) ; couleur ou matière de la reliure comme à Arnstein(éd. Theodor GOTTLIEB, p. 295-297) ; type d’écriture comme à Saint-Gall…), parfois plus que sur son contenu. Nous utilisons ces documents comme des catalogues, mais le vrai catalogue, c’est pendant très longtemps le gardien des livres, qui renseignera oralement le lecteur à la recherche d’un texte : il est l’interface entre le lecteur et le livre.
Certes, dès le IXe siècle, il existe de grands inventaires, quelquefois sous forme de livret ou de livre, en particulier en domaine germanique et liés d’une façon ou d’une autre à l’empire et ses dirigeants (c’est le cas de quelques grands inventaires rédigés en réponse à une enquête de Louis le Pieux au début des années 830 : Lorsch, Fulda, Cologne pour l’Allemagne, Reichenau, Saint-Gall pour la Suisse alémanique, Saint-Riquier pour la France). Ce sont des documents remarquables, qui peuvent décrire dans le plus grand détail le contenu des manuscrits, qui sont précieux pour repérer des œuvres perdues aujourd’hui (comme l’a déjà permis le catalogue de Lorsch du milieu du IXe s. (Dans Vaticano Pal. lat. 1877 f. 1-34, éd. Angelika HÄSE, 2002, p. 136-168, étude p. 71-76) ; certains des textes qu’il cite n’ont pas encore été retrouvés), et qui peuvent porter, comme à Saint-Gall au milieu du IXe siècle (dans les marges du Breviarium de Sankt Gallen SB 728), des traces d’emprunts ou de restitutions de livres, mais ils sont très difficiles à utiliser pour la recherche d’un texte : il n’existe pas d’index ou de listes alphabétiques, a fortiori pas de cote, mais dans le meilleur des cas une structure intellectuelle conforme au modèle cassiodorien, parfois jusque dans un certain détail (A Murbach, Vivarium peregrinorum, on s’est aidé au IXe siècle des Institutiones pour compléter le fonds. BMMF n° 1153 ; éd. Wolfgang MILDE, 1968, p. 36-48). Cependant, on ne sait absolument pas si cette structure symbolique, rangeant hiérarchiquement dans une première partie les « lettres divines » selon le degré d’autorité de leur auteur (généralement les Pères de l’Eglise en tête à la suite de la Bible), et les textes liés à l’apprentissage ou à une érudition profane pêle-mêle en fin d’inventaire, correspondait à un certain type de rangement dans la réalité, et lequel. Les livres, rangés selon leur usage prédominant, étaient d’ailleurs sans doute plus mobiles que nous ne l’imaginons.
Ces cas où le catalogue forme un codex sont exceptionnels avant le XIIIe siècle. La plupart du temps, les inventaires sont invisibles : au début, au milieu, à la fin d’un livre (très souvent la Bible, Augustin, Jérôme ou Grégoire le Grand), dans un cartulaire, dans un chartrier comme à Vigliano (Montale, Pieve S. Giovanni in Villiano ou Vigliano dépendant du chapitre cathédral de Pistoia, XIIe, éd. L. CHIAPPELLI,1889, et de nouveau dans ID., 1920, p. 161-214, texte p. 200-203), ils ne sont pas destinés à la consultation par un lecteur. Ils sont de plus périssables (voir le n° 5 de l’exposition), car liés à un usage et donc à une personne : celle qui les a faits pour répondre à des besoins précis, ou la personnalité dont la collection de titres reflète les intérêts particuliers, qui disparaîtront avec elle (par exemple les n° 2 et 3 de l’exposition). Une fois encore, Cluny marque une rupture, car son grand catalogue de la fin du XIe siècle, dont les dimensions étaient imposantes (115 x 49 cm) et qui était formé de quatre planches de bois recouvertes de parchemin etarticulées comme un livre (l’original n’est pas conservé. V. Veronika von BÜREN, 1990, p. 245-263, et EAD.,1992, p. 256-267, qui évalue les dimensions d’après les descriptions des XVIIe et XVIIIe siècles), devait être exposé. A la même époque, l’abbaye Saint-Pierre de Corbie est allée cependant plus loin en créant un premier catalogue alphabétique, encore imparfait, mais enfin nommé catalogus, et dont le titre indique qu’il était installé (insitus) dans la bibliothèque (in bibliotheca) : la renaissance de la bibliothèque s’accompagne donc de celle du catalogue, qui redevient, timidement, un instrument de recherche (BMMF n° 482 ; éd. Ursula WINTER, 1972, p. 35-74). Cependant, comme l’a fait remarquer Albert Derolez, ni le catalogue de Corbie ni celui de Saint-Bertin, catalogue alphabétique du début du XIIe siècle, ne résolvent le problème des volumes composites ((Albert DEROLEZ, 1979, p. 39) : ce sont donc des guides pour le repérage de certains livres, mais des instruments encore peu perfectionnés pour le repérage des textes (Françoise GASPARRI, Paris, 1994, p. 205-255 (p. 237-238)).
De l’homme à l’institution
On peut se demander comment renaissent la bibliothèque et le catalogue en tant que tels, et pourquoi. Plusieurs facteurs peuvent expliquer le passage d’une collection de type privé (qu’elle soit à l’usage d’un lecteur ou d’une petite communauté de lecteurs) à une collection au caractère institutionnel plus affirmé : on ne suggérera ici que quelques pistes.
La plupart des petites listes de livres décrivent des collections nativement institutionnelles, dans le sens où ces livres correspondent aux nécessités de la lecture communautaire, à l’église, au chapitre, au réfectoire, à la collation…, ou à l’obligation de lecture individuelle (en particulier à l’occasion du carême [cf. Regula Benedicti, chapitre 48], où moines et chanoines peuvent emprunter un ou plusieurs livres – rarement plus de trois – à rendre l’année suivante). Quand l’ordre de Cîteaux dresse en 1134 (la date est discutée à quelques années près)la liste des livres que toute abbaye cistercienne devrait posséder dans une même version, c’est de livres liturgiques qu’il se soucie. Les listes de livres de première nécessité, parfois appelés communes au XIIe siècle par référence à leur usage collectif, s’adressent à des lecteurs passifs (ceux qui écoutent les lectures) ou actifs par obligation. Il y a cependant d’autres lecteurs, plus rares mais paradoxalement mieux connus de nous car volontairement actifs. Chasseurs de textes, érudits à la recherche de textes classiques (comme Loup de Ferrière, Rathier de Vérone), théologiens à l’affût de manuscrits antiques (Florus de Lyon, Hincmar de Reims), ils constituent là où ils sont des collections de livres qui appartiennent à leur église ou leur abbaye, mais qui sont profondément personnelles. Ce sont des lettrés qui annotent les livres, dont on connaît souvent la main et les habitudes, dont les lectures sont liées à une activité intellectuelle intense et souvent à la rédaction d’œuvres nouvelles. Pour eux, la question de l’accès au livre et au texte ne se pose pas (sauf en termes de rareté) : les livres, ce sont eux qui les composent ou les font composer. Lecteurs mobiles appartenant à des réseaux familiaux et politiques de haut vol, ils ne passent pas par le custos librorum– ils le sont souvent eux-mêmes. C’est par eux que se constituent les grandes collections de textes rares du Moyen Âge occidental, et ce sont leurs déplacements qui expliquent les lignes de force de la transmission des textes. De sorte qu’ils ne sont pas le produit, comme on pourrait le croire aujourd’hui, et comme on le croit trop souvent, des grandes bibliothèques, mais au contraire la cause des bibliothèques : les bibliothèques sont la création de ceux qui lisent, et toute collection de livres hors normes a un sens, qu’il faut découvrir, ou du moins rechercher.
Les hommes meurent. Les collections constituées en vue d’une œuvre ou d’une recherche personnelle perdent alors leur sens, qui peut ne pas nous apparaître, et les livres sont rangés pour pouvoir servir à d’autres. Ainsi naissent des bibliothèques sur lesquelles nous n’avons parfois qu’un témoignage tardif, comme le grand catalogue du XIIe siècle de la bibliothèque carolingienne de Saint-Amand, qui fait d’ailleurs état de ses grands lecteurs du passé, comme Hucbald (dans Paris BnF lat. 1850 f. 199v-202v. BMMF n° 1677 ; éd. Léopold DELISLE, 2, p. 449-455 et add. p. 455-458). On pourrait soutenir que l’ordre alphabétique, qui de tous permet le mieux de retrouver un texte ou un livre, est le meilleur signe de ce retour des livres à l’absence de sens. La condition pour qu’ils soient utilisables par d’autres est ce passage de la logique de la recherche, qui est l’ordre secret d’un désordre apparent, à la logique visible, voulue évidente, du classement qui permettra d’autres utilisations : un passage du sens à l’ordre.
Ce sont les bénédictins qui, au vu de la documentation subsistante, ont le plus structuré leurs inventaires de livres. Sans doute sont-ils longtemps, avec leurs écoles et leurs grands savants, ceux qui ont le plus besoin d’un véritable instrument de travail. Mais il y a autre chose : cette tendance à l’organisation s’affirme plus fortement dans les bibliothèques d’abbayes réformées, et se fait d’autant plus sensible que les mouvements de réforme forment des réseaux plus fermes et plus centralisés. Il s’agit pour eux d’organiser leur documentation en reconstruisant leur passé pour mieux maîtriser le présent et l’avenir : c’est tout le travail sur la memoria bien étudié par l’historiographie allemande. Tout commence avec Cluny, qui fait de son grand catalogue structuré et dominé par Grégoire le Grand un modèle, colporté en domaine germanique, avec des manuscrits et avec les coutumes de Cluny, par ceux que l’on appelle aujourd’hui les néo-clunisiens. On retrouve avec Cluny certains ingrédients de la bibliothèque antique : le lieu dédié aux livres, le catalogue affiché, le lien entre l’affirmation du pouvoir et sa représentation à travers la bibliothèque, mais cette bibliotheca retrouvée n’est toujours pas un lieu d’étude et encore moins de sociabilité. Le catalogue et la bibliothèque ne sont des progrès bibliothéconomiques que de façon secondaire.
La leçon, cependant, ne sera pas perdue. On retrouve désormais, chez les réformés, clunisiens ou non, une volonté nette de structuration des inventaires, et même d’ostentation, fût-elle paradoxale comme à Prüfening (OSB, éd. MBKDS 4/1, p. 421-427)ou Arnstein (chanoines qui deviendront bientôt Prémontrés, éd. Theodor GOTTLIEB, p. 295-297)qui mettent la structure en valeur par un décor d’arcades (structure mémorielle empruntée aux libri viventium), mais cachent encore leurs inventaires au creux d’un livre. Les cisterciens adoptent ce genre de structure même pour des bibliothèques de très faible importance, comme celle de Haute-Fontaine (dans Paris BNF lat. 11548 f. 213v. BMMF n° 1919 ; identification et éd. François DOLBEAU,1988, p. 88-95). Ils procéderont non seulement au clonage des catalogues, comme à Cluny, mais plus encore au clonage des collections : ces bibliothèques seront dès le début institutionnelles, et non la création d’individus comme les grandes bibliothèques carolingiennes. Il s’agit d’un nouveau mode de filiation des bibliothèques, qui lie étroitement l’institution intellectuelle à l’identité d’une communauté. C’est peut-être la raison pour laquelle c’est chez eux que l’armarium du cloître se transforme le plus tôt en une petite pièce destinée au rangement des livres. C’est encore chez eux que l’on trouve, à la fin du XIIe s. dans un établissement d’importance très moyenne, chez l’armarius des Vaux-de-Cernay, une certaine « conscience catalographique » : vers 1180, il maîtrise mieux que personne les catégories de titre, de rubrique et d’incipit (dans Paris BnF Arsenal 209 f. 176v. BMMF n° 966 ; éd. H. MARTIN, 1886, p. 39-42). Avec les cisterciens en particulier, on glisse donc vers les structures de la bibliothèque moderne, mais avec un contenu souvent archaïque et assez stéréotypé qui peut s’avérer un frein au développement intellectuel.
Vers l’avènement d’une nouvelle bibliothéconomie
Le monde bénédictin réformé atteint là, d’une certaine façon, les limites de son système communautaire. Le progrès de l’alphabétisation entraîne d’ailleurs, même au sein des ordres religieux, un essor de la propriété privée du livre. Celle-ci, permise ou non, a toujours existé, mais elle se répand. Hors des monastères, elle touche de plus en plus les laïcs, qui, bibliophiles ou professionnels, réunissent des collections de beaux manuscrits historiques ou théologiques, de textes classiques ou de grammaire, de textes de médecine ou de droit… Les petites listes correspondant à ce genre de collections se multiplient aux XIIIe et XIVe siècles. On trouve la trace de cette diffusion du livre dans toutes les couches de la société à travers les actes notariés, comme les testaments, les actes de mise en gage... La situation est bien sûr variable selon les régions : déjà au Xe siècle, en Catalogne ou en Italie du sud, on trouvait souvent des livres dans des testaments, et même fréquemment dans les testaments de femmes en Catalogne, alors que dans d’autres régions le fait reste exceptionnel et limité à la couche supérieure de la société. Au XIIe s., la vie intellectuelle et l’enseignement se développent en-dehors des abbayes : de plus en plus limité chez les bénédictins, l’enseignement l’est davantage encore chez les cisterciens, du moins durant le premier siècle de l’ordre. Dans les villes, des maîtres enseignent dans les cloîtres, ou dans des salles qu’ils louent pour cela. C’est le siècle d’Abélard († 1142). Ainsi, se dissout le lien presque obligé entre bibliothèque monastique ou canoniale, apprentissage de la lecture et des lettres, et transmission des textes et des idées.
Encore une fois, ces changements sociaux s’accompagnent d’un changement dans la forme du livre. Il est moins souvent destiné à la lecture publique à voix haute, et de plus en plus à la lecture individuelle et à l’étude : il devient plus petit, il est souvent très annoté. Il n’est plus copié lentement pour conquérir la vie éternelle, mais vite et à moindre coût : l’écriture s’amenuise, les abréviations se multiplient. Le livre se privatisant et s’urbanisant, c’est aussi de plus en plus le cas de sa copie. Un étudiant va se copier ses livres d’étude, ou va les acheter à un copiste professionnel et bientôt à un libraire, un stationarius dira-t-on au XIIIe siècle, qui les copie cahier par cahier (par pecia) à partir de modèles autorisés par l’université. On copie pour soi ou pour son client : c’est un nouveau mouvement de privatisation du livre et des collections de livres, qui va de pair avec une professionnalisation de la copie et de la lecture. Et ainsi se dissout le lien, nécessaire jusque-là, entre scriptorium et bibliothèque : le modèle cassiodorien, dès le XIIe siècle, n’est plus universel.
De cette évolution caractéristique des XIIe et XIIIe siècles naissent deux modèles de bibliothèques qui sont les ancêtres des bibliothèques modernes : la bibliothèque privée, celle du dévot, du savant, du médecin, du juriste ou du prince, bibliothèque qui sera dans certains cas amenée à devenir bibliothèque d’Etat et à terme une forme de la bibliothèque publique, et la bibliothèque d’étude, la bibliothèque d’essence universitaire, forme nouvelle de la bibliothèque communautaire, elle aussi amenée à s’ouvrir à un large public.
En Avignon, c’est leur bibliothèque personnelle que les papes ont alimentée à l’aide du droit de dépouille, qui faisait revenir à la bibliothèque pontificale les livres des prélats morts en curie, souvent des collections à fort caractère juridique et universitaire, de personnages que leurs études avaient menés aux plus hautes fonctions Bibliothèques ecclésiastiques au temps de la Papauté d’Avignon. II. Inventaires de prélats et de clercs français - Edition, publiés par Marie-Henriette JULLIEN de POMMEROL et † Jacques MONFRIN, Paris, 2001 (DER, 61 ; HBM, 12). Le premier pape à avoir fondé une bibliothèque à Rome, Eugène IV (1431-1447), possédait en définitive la collection d’un homme cultivé, plus intéressé par les textes des humanistes de son temps que par les manuscrits anciens, et ce n’était pas encore à proprement parler la bibliothèque pontificale (Jeannine FOHLEN, 2008). La bibliothèque d’Etat, bibliothèque comme instrument du pouvoir, apparaît à la fin du XIVe siècle avec Charles V, qui comprend que l’autorité royale ne peut s’exercer sans un savoir qui n’est plus, désormais, le seul apanage du clergé. L’objectif bibliophilique et humaniste ne semble pas premier chez Charles V, et c’est ce qui distingue sa bibliothèque de celle de son père Jean le Bon et d’autres grands princes des XIVe et XVe siècles. La toute nouvelle bibliothèque du roi est ouverte à des lecteurs extérieurs ; foyer de traduction en français, elle devient ainsi le creuset d’une nouvelle culture laïque. L’existence d’une telle bibliothèque entraîne certainement un renouveau de l’intérêt pour les livres dans l’entourage du souverain, et suggère à certains milieux, comme celui des parlementaires, que la collection de livres à caractère professionnel ou parfois bibliophilique est un moyen et plus encore une manifestation de la réussite sociale, un signe d’appartenance à des cercles choisis. L’exemple royal favorise la diffusion d’un modèle érudit dans de nouvelles couches de la société. Certes, la bibliothèque du roi n’est pas encore tout à fait la « bibliothèque royale » : vendue au duc de Bedford en 1424 et dispersée à sa mort (1435), elle n’est pas physiquement à l’origine de notre bibliothèque nationale ; symboliquement cependant, elle marque une évolution de la collection privée princière vers une institution politique.
Et les pauvres ? L’étudiant du XIIIe siècle, simple clerc, qui n’appartient pas à l’un des nouveaux ordres mendiants, religieux bien insérés dans la vie du siècle mais qui ont derrière eux une communauté et donc une bibliothèque, n’a plus à sa disposition de bibliothèque collective. Que fait l’étudiant s’il est pauvre et s’il est seul ? Il faut trouver un nouveau système communautaire, différent de l’organisation monastique, qui tienne compte de l’évolution de la société. Dès le XIIIe siècle, ce nouveau modèle communautaire est mis en place précisément grâce à l’essor des collections personnelles, par des individus qui créent des fondations privées auxquelles ils lèguent leurs biens et le cas échéant leurs livres, pour accueillir les étudiants pauvres et leur donner les moyens de travailler : ce sont les collèges, le plus célèbre d’entre eux ayant été fondé par Robert de Sorbon vers 1257. Les ordres religieux suivent rapidement, en fondant des maisons pour leurs meilleurs éléments dans les grandes villes universitaires. Les bibliothèques de collèges sont donc orientées d’emblée moins vers la conservation et la transmission que vers la consultation et le prêt : c’est un lien nouveau qui se tisse entre privatisation de la lecture et ouverture de la bibliothèque au public, et que le modèle cassiodorien interdisait de fait.
Tant que les manuscrits sont peu nombreux, le collège de Sorbonne les prête sans trop d’inquiétude. Les livres qui ne sont pas prêtés sont rangés dans des coffres. C’est une bibliothèque à l’ancienne, bien que tournée vers l’extérieur. C’est quand il faut faire face aux deux problèmes majeurs du bibliothécaire, l’augmentation du nombre des livres et l’accroissement du nombre de lecteurs, que celui-ci, qui ne peut plus faire face, crée un ou des instruments de travail (Gilbert FOURNIER, 2011, p. 158-215). En 1289, on sait que le collège de Sorbonne possède environ un millier de livres, et qu’il existe deux bibliothèques, l’une de conservation et de prêt, l’autre de consultation avec des livres enchaînés à des pupitres. La première, fermée mais non étanche, vient du modèle monastique, la seconde, ouverte, est accessible aux lecteurs, pour lesquels elle est devenue un espace de lecture et d’étude. Même si la bibliothèque des franciscains de Césène, l’une des plus anciennes bibliothèques médiévales d’Occident qui ait traversé les siècles sans changement, est bien postérieure (1454), on peut imaginer la première bibliothèque de lecture meublée et éclairée comme elle. Les livres n’ont pas encore reconquis les murs, ils sont rangés à plat devant le lecteur et selon un classement thématique. À Césène, il y en a aujourd’hui 343, encore en place.
Tant que seul l’armarius a accès aux livres, il n’a guère de problèmes : il a peu de volumes à gérer, il les connaît, il retrouve les livres et les textes. Mais quand le nombre des livres augmente, quand le nombre des lecteurs augmente, et quand les livres circulent, un homme seul ne peut plus maîtriser la situation, et se pose le problème, nouveau, de la conciliation des besoins des lecteurs et des besoins du bibliothécaire, qui ne coïncident pas. Le lecteur veut lire les livres, les emprunter, il veut des livres mobiles, et le bibliothécaire, lui, a peur de perdre ses livres et les rêves immobiles ; et comme l’université a des programmes, plusieurs lecteurs veulent les mêmes textes, ce qui oblige le bibliothécaire à distinguer les exemplaires : il lui faut dissocier la notion de texte de la notion de livre, faire correspondre à un texte plusieurs exemplaires et à un livre plusieurs textes.
Les réponses à ces besoins contradictoires résident dans le raffinement du catalogage et la mise au point de la cotation. L’un ne va pas sans l’autre : la plupart des cotes anciennes composées de deux éléments renvoient à un classement thématique général marqué par une ou plusieurs lettres ou encore un chiffre (le plus souvent romain), et à un classement interne à chaque section marqué par un numéro d’ordre généralement en chiffres arabes (ou une ou plusieurs lettres), comme c’est le cas dans le grand catalogue de Clairvaux fait à l’instigation de Pierre de Virey en 1472(dans Troyes, BM, 2299, exemplaire du bibliothécaire, et Troyes, BM, 521, exemplaire d’apparat. BMMF, n° 422 ; éd. André VERNET, 1979, p. 66-345. La Biblionomia de Richard de Fournival (n° 6 de l’exposition) propose un système de cotation particulièrement raffiné). On l’observe encore aujourd’hui dans nombre de bibliothèques historiques héritières d’un rangement dans des pupitres répartis de part et d’autre d’une allée (la Laurentienne à Florence, la Malatestiana à Césène), qui ajoutent parfois dans la cote des éléments topographiques (pupitres de droite ou de gauche : S pour sinistra, D pour dextra), de format, de support (parchemin ou papier comme à Saint-Pétersbourg). Ce type de système d’identification permet la rédaction, comme au collège de Sorbonne en 1321-1338, de catalogues topographiques et par matières complémentaires, et rend les index alphabétiques pleinement efficaces pour la localisation des textes (on peut citer l’exemple célèbre, en 1513-1514, du catalogue de Saint-Victor par Claude de Grandrue et de son index, n° 11 de l’exposition). Vers la fin du XVe siècle, on trouvera de tels monuments catalographiques aussi bien chez les mendiants, les cisterciens, que dans des bibliothèques capitulaires ou laïques – la liste n’est pas exhaustive.
La cotation des livres a été préparée dès la seconde moitié du XIIe siècle par des essais bénédictins et cisterciens. Le premier exemple certain que je connaisse remonte à 1170, quand à Christ Church de Canterbury on éprouve le besoin de distinguer les exemplaires d’un même texte d’étude : le bibliothécaire emprunte alors à la tradition des archives l’idée de marquer chaque manuscrit par un signum (le plus souvent une lettre) qui lui sera propre (éd. Montague Rh. JAMES,1903, p. 7-12, reprod. du document p. 3-6, analyse p. XXXII-XXXIV), système plus simple que celui de l’incipit et de l’explicit repères très utilisé à partir du XIIIe siècle, mais plus risqué car la reliure ou le feuillet portant le signum peuvent se perdre. A Rievaulx, à la toute fin du XIIe siècle, le catalogue des livres est organisé en sections thématiques marquées par les lettres de l’alphabet (éd. Anselm HOSTE, 1962 p. 149-170 et 170-175 ), avec à la fin de chaque section la somme des livres qui la composent : de là à numéroter les livres et à les marquer d’une cote alphanumérique, il n’y avait qu’un pas, qui à ma connaissance n’a pas été franchi, sans doute parce qu’une abbaye cistercienne, même très importante, n’était pas confrontée aux difficultés qui assaillaient un bibliothécaire de collège. La cote est en effet une réponse précise et élégante aux nécessités de la conservation (identifier les volumes, classer les livres et indexer les textes) et aux besoins de lecteursnombreux dans une bibliothèque vivante (éd. Anselm HOSTE, 1962 p. 149-170 et 170-175) : elle permet l’association ou la dissociation, à volonté, du texte et de son support, et l’identification sûre de l’un et de l’autre par le bibliothécaire comme par l’usager. Elle donne les coordonnées spatio-intellectuelles du livre, dans une bibliothèque désormais ouverte au public.
Les efforts de structuration des collections, d’abord idéologiques, ont donc créé les conditions de l’avènement de la bibliothèque à proprement parler, et de son catalogue. D’abord destiné à structurer la mémoire collective et donc l’identité de communautés religieuses, puis à les représenter à l’extérieur, le catalogue structuré va devenir, avec l’accroissement des collections, avec l’avènement d’une culture de plus en plus ancrée dans les villes et de nouveaux lecteurs, un véritable instrument de travail. En un lieu dédié à la conservation et à la lecture, séparé comme dans l’Antiquité de l’activité de copie, à explorer désormais grâce à de véritables catalogues topographiques, par matières ou alphabétiques, et où le rangement des livres, grâce à la cote, fait sens, le lecteur a enfin conquis non seulement l’accès au livre, mais, ce qui est beaucoup plus important, l’accès au texte, et l’Occident latin a retrouvé l’essence même de la bibliothèque. Il ne lui restera plus qu’à redécouvrir que dans une bibliothèque on devrait pouvoir dialoguer non seulement avec les textes, mais aussi avec son voisin.
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